Éducatrice spécialisée HES-SO, coach membre de SECA, enseignante, auteure, peintre

14. Le combat

Très peu de temps après mon retour du camp, remplie d’enthousiasme, je suis allée prier dans la maison de Caroline. Cette maison appartenait à la famille de son mari depuis plusieurs générations. Ma soeur me disait ne pas pouvoir prier à l’intérieur, mais seulement dans le jardin. J’ai voulu faire comme le diacre qui avait prié pour moi en chassant un esprit de tristesse. Naïve, inconsciente du danger et de ce qui allait m’arriver, je me suis lancée, toute seule.

Ma Bible à la main, je me sens pleine d’assurance. Je vais prier dans chaque pièce et chasser, comme Jean-François. Je passe ainsi de pièce en pièce. Tout commence bien. Dans la cuisine, dans le salon, je prie et proclame « Que tout ce qui ne vient pas de Dieu sorte de cette pièce, au nom de Jésus ! Viens, Saint-Esprit, remplis cet endroit ».

Quelle n’est pas ma surprise de voir dans un réduit une sorte d’hérisson noir qui me montre les dents et qui disparait lorsque je le chasse au nom de Jésus ! Je n’ai pas le temps de réfléchir. J’avance, comme poussée. Ayant visité tout le rez-de-chaussée, je descends à la cave. Là, je vois des ombres dans la chaufferie. Je les chasse aussi. Je me sens guidée et je fais ce qui me vient à l’esprit. Je monte à l’étage. Dans une des chambres à coucher, je vois des tissus gris qui flottent et qui s’appellent Déception, Tristesse, Blessure… Je parle de plus en plus fort. A cause de ma voix, Caroline doit aller dans le jardin avec son bébé et je reste seule dans la maison. Dans une autre pièce, il y a des cris et des tourments. Je prie toujours, concentrée sur ce qui se passe.

Puis, j’entre dans le grenier. Devant moi se tient une vieille femme très maigre enveloppée dans un tissu noir. C’est la mort ! Elle me regarde et rit. Je n’ai pas du tout peur. Je suis remplie de colère et de force. Je la menace. Je la chasse. Il ne se passe rien. Elle rit. Je parle et prie. Et encore. Et encore. A force, je vois qu’à chaque fois que je parle, elle devient plus petite. A un moment donné, elle passe devant moi très vite et je la suis. Je la retrouve dans un recoin du corridor. Je lui ordonne encore de partir au nom de Jésus. Elle ne rit plus et devient toute petite. Je la chasse en hurlant. Elle disparaît comme si elle avait fondu. J’invoque alors la présence du Seigneur dans cette maison. Je tombe à genoux et je vois une chute d’eau blanche entrer depuis le toit et remplir la maison. Je me relève et je sors de la maison, épuisée. Il paraît qu’on m’a entendue même dehors. Redevenue calme, je ressens une peur énorme en pensant ce que j’ai vécu. Et je supplie Dieu de ne pas m’envoyer nettoyer d’autres maisons.

Un jour, bien après, Caroline a appris qu’une des ancêtres qui habitaient dans cette maison était une femme qui parlait avec les morts. Lorsque j’ai raconté cette expérience à des croyants, ils m’ont dit que je ne devrais plus me lancer comme ça. Il fallait que je m’affermisse dans ma foi et que je sois conduite par le Saint-Esprit. Là, très nettement, j’ai été inspirée et protégée, car je crois que le Saint-Esprit est venu à ma rescousse. Je n’ai pas répondu à un ordre du ciel, je pense. C’est devant la situation, où je m’était mise en péril, qu’il est intervenu. Ce fût mon premier face-à-face avec des démons. Jamais auparavant je n’aurais pensé vivre quelque chose comme ça. J’avais cru que c’était des histoires pour les films et les livres. Mais, non, cela existe. Après bien des années où ma foi a mûri, j’ai de nouveau été confrontée à eux. Cela s’est passé dans des moments où j’avais la conviction que c’était en ordre et cela s’est bien terminé.

Après ce « nettoyage », Caroline a pu prier dans sa maison. C’est devenu un lieu de bénédictions pour les gens qui y passent. Une école chrétienne y a posé ses premiers fondements. Aujourd’hui on y prie, danse, chante.
C’est une oasis d’amour et de paix.